Trajectoires d’antidépresseurs normes d’usage et controverses sur la consommation de psychotropes en France au XXème siècle


Anne-Sophie Mazas
Directeur : Jean-Paul Gaudillière
Démarrage : 2009

Laboratoire CERMES3

Dans ce travail je m’intéresse aux usages de l’image et de l’information scientifique dans la promotion du médicament et à leur histoire récente.
Il s’agit de comprendre les évolutions des pratiques du marketing et sa professionnalisation au travers, notamment, de l’analyse des supports et des média publicitaires.
L’analyse des évolutions des techniques du marketing, avec l’arrivée du marketing scientifique dans les années 50 en France, s’illustre non seulement par la systématisation des pratiques de visite médicale mais aussi, ce qui constitue le coeur de ma recherche, par la diversification des supports et l’utilisation massive de l’information scientifique au sein même de l’argumentaire promotionnel.
Ces évolutions sont bien sûr liées à l’histoire du marketing mais aussi aux spécificités de la publicité pharmaceutique qui bascule, dans l’après-guerre, d’une pratique s’adressant directement au consommateur ou au patient à une pratique visant les professionnels de santé, les prescripteurs.
En menant un travail d’analyse sur un premier ensemble d’archives constitué par le matériel de promotion (dépliants, encarts, revues de laboratoire, documents d’aide à la visite des délégués médicaux…) issu des archives des laboratoires pharmaceutiques français (Roussel) et suisse (Ciba-Geigy) mais aussi de la revue Le Concours Médical destinée aux professionnels de santé, j’essaye à la fois d’identifier les trajectoires de ces pratiques sur une longue période (depuis l’après-guerre jusqu’aux années 80) et à la fois d’interroger les spécificités de l’outillage (conceptuel, rhétorique et légal) employé dans la publicité pharmaceutique.
J’attache une attention particulière à l’examen historique des formes de régulation (professionnelles et légale) qui s’incarnent et se formalisent à travers un ensemble de dispositifs d’ “autorisation préalable à la diffusion publicitaire” (visa) et de codes de bonnes pratiques qui contraignent le discours publicitaire sur le médicament. Une des difficultés majeures de mon travail consiste à faire dialoguer entre elles, d’une part, les trajectoires des pratiques de visualisation et d’autre part, l’histoire de la construction de marché pour un produit donné en se fondant principalement sur son “histoire publicitaire” (reconstituée à partir des archives promotionnelles incomplètes). Dit autrement, en prenant des exemples de médicaments issus de trois classes thérapeutiques (psychotrope, antalgique, hormone sexuelle) il me faut parvenir à identifier les techniques de visualisation, et voir en quoi elles contribuent à la construction d’un nouveau marché, à son renforcement où au maintien d’une position de leader sur le marché d’une classe thérapeutique spécifique.
A partir d’un travail d’analyse d’un deuxième ensemble d’archives composé par les procès-verbaux de la commission du Visa publicitaire je tenterai de comprendre en quoi les techniques de visualisation déployées par les publicitaires dans la conception des supports promotionnels en vue de la construction d’un marché peuvent être, en partie, considérées comme des “réponses” aux contraintes imposées par le phénomène de régulation qui entoure les pratiques promotionnelles du médicament.

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